Tout savoir sur la double matérialité (CSRD)

Les entreprises, en tant que grandes émettrices de gaz à effet de serre, jouent un rôle central dans la transition écologique. Face à l’urgence climatique et aux défis environnementaux, leur engagement vers des pratiques plus durables devient essentiel pour atteindre les objectifs de réduction des émissions de carbone à l’échelle mondiale.

C’est dans cette optique que le reporting extra-financier intervient. Ce dispositif, désormais obligatoire dans le cadre de la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive), vise à encadrer et structurer la manière dont les entreprises rapportent leurs actions et impacts liés au développement durable.

Autrement dit, le concept de double matérialité a pour ambition d’améliorer la transparence et la fiabilité des données extra-financières, notamment celles concernant les enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG).

Dans cet article, on vous dit tout sur le concept de double matérialité CSRD.

 

 

La double matérialité : origine, définition et enjeux

 

La matérialité, qu’est-ce que c’est ?

 

 

À l’origine, le concept de matérialité provient du domaine financier, il repose sur la sélection d’indicateurs comptables permettant d’évaluer la performance et la fiabilité des informations financières d’une entreprise.

Ce concept de matérialité a ensuite été adapté au domaine de la RSE et du reporting extra-financier afin d’aider les entreprises à identifier et à prioriser les enjeux de durabilité qui ont le plus d’impact sur leurs performances financières.

Vous l’aurez compris, le concept de matérialité se concentre uniquement sur la performance financière d’une entreprise. Certaines données concernant les enjeux sociaux et environnementaux ne sont ici pas prises en compte, car elles ne sont pas considérées comme “matérielles”.

 

Le concept de double matérialité : définition

 

Pour aller au-delà de la simple analyse financière de l’entreprise, on distingue désormais deux perspectives de matérialité. 👇

 

👉 La matérialité financière (ou matérialité simple) : Celle-ci concerne les questions de durabilité qui peuvent affecter positivement ou négativement la performance financière d’une entreprise (revenus, bénéfices, trésorerie, etc). Cela inclut les risques et opportunités pour l’entreprise liés à des facteurs environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) tels que les réglementations environnementales, les changements climatiques ou les préoccupations sociales.

 

👉 La matérialité d’impact (ou matérialité extra-financière socio-environnementale) : Cette deuxième dimension se concentre sur les impacts (positifs ou négatifs) de l’activité de l’entreprise sur son environnement économique, social et écologique. Elle prend en compte tous les impacts environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG). Par exemple, la manière dont les activités de l’entreprise affectent les communautés, les écosystèmes ou encore les droits de l’homme.

 

 

La double matérialité : le socle de la CSRD

 

 

Ce concept de double matérialité est un élément clé de la CSRD. Rappelons que cette directive, entrée en vigueur en janvier 2024, impose de nouvelles obligations et normes concernant le reporting extra-financier des grandes entreprises.

Concrètement, celles concernées doivent établir une analyse de double matérialité afin d’identifier les enjeux de durabilité à inclure dans leur rapport final. Parmi ces enjeux figurent des aspects essentiels tels que les émissions de gaz à effet de serre, la gestion de l’eau, le respect de la biodiversité, les droits de l’Homme, la diversité ou encore l’éthique.

Ce concept de double matérialité souligne ainsi l’interdépendance entre les dimensions financières et d’impact – et ce, en insistant sur l’importance de les considérer conjointement pour évaluer la performance globale d’une entreprise.

En effet, pour qu’une entreprise soit pleinement responsable et durable, il est essentiel de donner autant de poids à l’information financière qu’à l’information de durabilité. Cela permet de mieux informer les parties prenantes et de guider les entreprises dans l’élaboration de stratégies bas carbone, favorisant ainsi un développement durable et responsable.

Prenons un exemple pour bien comprendre ce concept.

💡 Une entreprise travaillant dans le domaine du bâtiment décide d’adopter des techniques de construction écologique. Pour cela, elle utilise des matériaux durables et choisi d’intégrer les énergies renouvelables.

Cette démarche peut être motivée par une perspective de matérialité d’impact car elle contribue à la réduction des émissions de carbone, à l’amélioration de l’efficacité énergétique des bâtiments et donc à la protection de l’environnement.

En parallèle, concernant la matérialité financière : l’utilisation de matériaux durables permet de réduire les coûts d’exploitation sur le long terme grâce aux économies d’énergie. Cette initiative permet aussi de répondre à une demande croissante de la part des clients qui recherchent des constructions respectueuses de l’environnement.

 

 

Pourquoi faire son analyse de double matérialité ?

 

 

L’analyse de la double matérialité, qui combine les dimensions financières et d’impact, offre aux entreprises plusieurs avantages.

 

➡️ Évaluation globale : Elle permet d’évaluer l’impact global de l’entreprise, d’identifier l’ensemble des risques et des opportunités et d’accroître la transparence concernant sa performance.

 

➡️ Réponse aux attentes des parties prenantes : Investisseurs, consommateurs, employés et fournisseurs accordent davantage leur confiance à une entreprise qui pratique l’analyse de double matérialité. Cela constitue ainsi un avantage concurrentiel et améliore l’image de marque de l’entreprise.

 

➡️ Définition des priorités : Cette double analyse aide les organisations à définir et à prioriser les enjeux stratégiques, facilitant ainsi l’élaboration d’une feuille de route claire et cohérente, alignée sur les attentes des parties prenantes et les objectifs de long terme. Par exemple, les entreprises peuvent identifier les changements nécessaires permettant d’intégrer les enjeux environnementaux et sociaux dans leur stratégie, en développant des politiques et des pratiques plus responsables.

 

➡️ Prise de décision : Ce cadre permet aux entreprises et aux investisseurs de prendre des décisions qui tiennent compte des retours financiers, mais aussi des impacts sociaux et environnementaux de leurs activités.

 

➡️ Conformité réglementaire : Avec l’émergence de réglementations de plus en plus strictes en matière de durabilité, le concept de double matérialité permet aux entreprises de se conformer aux exigences légales qui évoluent sans cesse.

 

 

Réaliser son analyse de double matérialité : S’y préparer en 3 étapes

 

 

La CSRD a établi un cadre réglementaire commun pour définir la méthodologie à suivre concernant l’analyse de double matérialité. L’objectif de ce cadre est alors d’améliorer la transparence et la fiabilité des reportings, tout en facilitant leur comparaison entre les diverses entreprises européennes.

Voici donc les 3 étapes clés pour réaliser l’analyse de double matérialité de son entreprise.

 

Étape 1. Identifier les enjeux

 

Cette première étape consiste à dresser la liste des enjeux potentiels. D’ailleurs, les enjeux soumis à l’analyse de double matérialité sont précisés par les 12 normes européennes de l’ESRS E1 qui encadrent le reporting de durabilité. 👇

 

  • Normes environnementales : changement climatique, eau, biodiversité, pollution, ressources et économie circulaire ;
  • Normes sociales : main d’œuvre de l’entreprise, employés de la chaîne de valeur, communautés affectées, utilisateurs et consommateurs finaux ;
  • Normes de gouvernances : conduite des affaires.

 

Notons que la liste des enjeux de durabilité définie par les normes ESRS reste générale. Il est essentiel d’affiner la liste via des recherches afin d’aboutir à des enjeux qui correspondent davantage au secteur d’activité de l’entreprise.

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Il est recommandé de consulter toutes les parties prenantes de l’entreprise pour chaque norme afin de faciliter le recueil des informations. En effet, bien que non obligatoire, discuter avec ses parties prenantes permet de mettre en place une stratégie collaborative, efficace et pérenne.

 

Étape 2. Mesurer l’impact potentiel pour chaque enjeu

 

Après avoir établi la liste des enjeux de durabilité, il faut les évaluer – et ce, en termes d’impact et de matérialité financière.

Pour accompagner les entreprises, l’EFRAG (European Financial Reporting Advisory Group) a mis à disposition une méthodologie complète. Celle-ci aborde plusieurs aspects, notamment :

 

  • La qualité de l’impact : Il est crucial de déterminer si l’impact est positif ou négatif afin de comprendre la contribution de l’entreprise à la société et à l’environnement.
  • Le type d’effet : Les effets peuvent être avérés (déjà observés) ou potentiels (prévisibles à l’avenir). Cette distinction est importante pour anticiper les conséquences à long terme des actions de l’entreprise.
  • Gravité de l’impact : Cette dimension prend en compte plusieurs critères tels que l’importance, l’étendue (scope) et la remédiabilité de l’impact. Une gravité plus élevée nécessite une attention et des actions plus immédiates.
  • Probabilité d’occurrence : Évaluer la probabilité que chaque impact se matérialise permet de prioriser les enjeux selon leur potentiel de survenance.
  • Échelle de temps : L’évaluation doit également tenir compte du calendrier dans lequel les impacts pourraient se produire, qu’ils soient à court, moyen ou long terme.

 

💡 À savoir : Des seuils sont établis sous forme chiffrée afin de servir de repères pour évaluer la performance de l’entreprise. En cas de dépassement, l’entreprise est tenue de soumettre un rapport spécifique justifiant les raisons de cette situation. Il est donc crucial que les seuils établis soient à la fois cohérents et raisonnables, afin d’assurer une évaluation pertinente et efficace des impacts.

 

Étape 3. Préparer le reporting

 

Aucun format n’est imposé pour élaborer le reporting. Il peut alors prendre la forme d’un texte, d’un tableau, d’un graphique ou encore d’une matrice.

La matrice est le format le plus souvent utilisé avec en abscisse la matérialité financière et en ordonnée la matérialité d’impact.

 

 

Sachez aussi que la publication de l’analyse de double matérialité dans le rapport de durabilité reste au bon vouloir de l’entreprise.

 

La double matérialité : pour qui ?

 

Actuellement, ce sont principalement les grandes entreprises qui sont tenues de se conformer aux obligations de reporting en matière de durabilité. Les délais pour ces exigences, qui peuvent être sujets à des modifications, sont les suivants :

 

  • À partir de Janvier 2025 (pour les données de 2024) : les entreprises déjà soumises à la NFRD, c’est-à-dire les entités d’intérêt public comptant plus de 500 employés en moyenne, avec un total bilan supérieur à 20 millions d’euros ou un chiffre d’affaires de plus de 40 millions d’euros.
  • Dès 2026 (pour les données de 2025) : les entreprises qui dépassent deux des trois seuils suivants : plus de 250 employés en moyenne, un chiffre d’affaires supérieur à 40 millions d’euros ou un bilan total de plus de 20 millions d’euros.
  • Dès 2027 (pour les données de 2026) : les PME cotées sur un marché réglementé de l’UE, comprenant celles ayant entre 10 et 250 employés. Ces entreprises peuvent également choisir de reporter leur obligation de reporting pendant trois ans en utilisant un standard allégé.
  • Dès 2029 (pour les données de 2028) : les entreprises non européennes qui génèrent un chiffre d’affaires supérieur à 150 millions d’euros dans l’UE au cours des deux dernières années consécutives, et qui ont au moins une succursale ou une filiale dans l’UE ayant généré un chiffre d’affaires de plus de 40 millions d’euros l’année précédente.

 

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